Des femmes ayant marqué l’Histoire : Caroline B. Getty
Caroline B. Getty (1864–1955) a été le premier professeur de Science Chrétienne en France. Au cours d’une carrière qui englobe les deux guerres mondiales, elle a exercé la pratique publique de la guérison pendant cinquante ans. Ses souvenirs concernant la traduction en français de Science et Santé avec la Clé des Ecritures de Mary Baker Eddy, ses articles dans les périodiques de la Science Chrétienne, ainsi qu’une courte biographie rédigée par ses élèves fournissent une abondante documentation pour comprendre sa vie et son œuvre.
Née de parents anglais, Mme Getty a grandi dans la ville de Calais, dans le nord de la France, où sa mère était professeur d’anglais. A son retour en Angleterre, elle a travaillé dans le domaine de la confection et de la chapellerie, à Leeds. Dans le magazine hebdomadaire Christian Science Sentinel, elle explique, en 1905 : « Je me suis intéressée [à la Science Chrétienne] grâce à la guérison de mon beau-frère, qui habitait en Amérique. » Elle y parle aussi de sa nouvelle religion : « [Elle] m’aide considérablement dans mes affaires : mon établissement, qui emploie une cinquantaine de jeunes filles, poursuit son activité de façon harmonieuse, le travail ne manque pas même en période de soi-disant crise commerciale, nous commettons moins d’erreurs, et toutes ces améliorations se sont produites parce que je prends conscience chaque jour que Dieu est ici même, chez moi comme dans ma boutique. »1
Après avoir suivi le Cours Primaire de Science Chrétienne avec Lady Victoria Murray, Caroline Getty a quitté le monde des affaires pour se lancer dans la pratique de la guérison, en 1908. Comme son ancienne activité nécessitait qu’elle se rende à Paris pour suivre les tendances de la mode, elle connaissait bien cette ville. En 1912, elle a pris la décision courageuse de quitter l’Angleterre pour s’établir en France, où la Science Chrétienne était à l’époque quasiment inconnue.
Elle est devenue professeur de Science Chrétienne peu de temps après son installation à Paris, et a donné son premier cours en 1915. Cette classe n’avait que deux élèves, mais tous deux sont devenus praticiens de la Science Chrétienne. Depuis 1913, elle faisait partie d’un comité de trois personnes chargé de traduire Science et Santé en français. Expliquant sa conception de ce travail, elle écrit notamment ceci : « Nous avions décidé de commencer par le chapitre “Récapitulation” afin d’établir le vocabulaire français équivalent aux termes anglais utilisés dans l’enseignement. Notre première difficulté a été de trouver un équivalent au mot anglais Mind qui n’existait pas en français… Ce n’est qu’au bout de plusieurs mois de travail et de recherche que nous avons retenu le mot “Entendement” et que nous l’avons utilisé uniquement pour Mind avec une majuscule, et pour mortal mind [entendement mortel] sans majuscule. M. Allison V. Stewart [chargé par l’Eglise de la Science Chrétienne de superviser la traduction] a déclaré : “Le mot anglais mind ne signifiait pas grand-chose pour nous jusqu’à ce que Mary Baker Eddy le couronne d’une majuscule et l’appelle Dieu.” »2
Effectuée durant la tourmente de la Première Guerre mondiale, la traduction française de Science et Santé est parue pour la première fois en 1917.
Caroline Getty est l’un des membres fondateurs de Deuxième Eglise du Christ, Scientiste, à Paris. Elle a servi en qualité de Comité de Publication pour la France de 1920 à 1930. Les lettres qu’elle a envoyées à la presse sont empreintes d’intelligence et de clarté, notamment sa lettre destinée au journal L’Œuvre, en 1929.
En 1940, durant la Seconde Guerre mondiale, Mme Getty est internée avec d’autres sujets britanniques demeurant en France. On rapporte qu’elle aurait dit un jour aux autorités allemandes : « Non, vous ne pouvez pas me retenir. Dieu m’a chargée d’un travail, et vous allez me libérer pour que je le fasse. » Relâchée au bout de six semaines avec d’autres prisonniers de plus de 70 ans, Mme Getty retourne à Paris. L’une de ses élèves se souvient d’une rencontre particulière qu’elle a eue avec elle durant ces années difficiles : « Durant l’exode, ma fille et moi étions sur les routes… La souffrance humaine dont j’ai été témoin m’a semblé être la fin du monde. J’étais tellement bouleversée… Je n’arrivais pas à penser de manière scientifique. Après un voyage de dix-neuf jours, nous sommes retournées à Paris. Je suis aussitôt allée à l’église… mais j’étais encore très malheureuse. Le lendemain, je suis allée voir Mme Getty. Voyant l’état dans lequel je me trouvais, elle m’a dit d’ouvrir Science et Santé et de lire. En un instant, tout le fardeau, le cauchemar que j’avais vécu a disparu, et j’ai retrouvé mon état normal, sans que Mme Getty ait prononcé un seul mot. Je ne l’oublierai jamais. »3
Les élèves de Mme Getty en parlaient comme d’« une étudiante consciencieuse de la Bible ».4 Les articles qu’elle a publiés dans les magazines de la Science Chrétienne confirment la justesse de ces propos. Au cours de sa longue existence, elle a affronté de nombreuses difficultés avec un sang-froid, une autorité et un amour remarquables. Lorsqu’elle a quitté ce monde, en 1955, le mouvement de la Science Chrétienne, même si encore modeste, était bien établi dans la France de l’après-guerre.