Des femmes ayant marqué l’Histoire : Jeannie Dove
Mary Baker Eddy et ses élèves ont établi la Science Chrétienne en Amérique du Nord à la fin du XIXe siècle, mais cette religion est restée peu connue au Ghana jusque dans les années 1950. En 1951, un homme originaire d’Accra, la capitale, est guéri à Londres grâce à ce système de guérison fondé sur la prière. L’intérêt que suscite cette guérison conduit à la création, en 1954, d’un groupe informel de huit personnes. Trois ans plus tard, quelques mois après l’indépendance du Ghana, ancienne colonie britannique, le groupe achève la construction d’une église dans le centre d’Accra. Des personnes généreuses, intéressées par la Science Chrétienne, ont loué le terrain pour un shilling par an pendant 50 ans, renouvelable pour 50 autres années. Grâce à une croissance régulière, le groupe est reconnu en tant que société de la Science Chrétienne en 1960, laquelle figure dans le répertoire du Christian Science Journal. 1
C’est au cours de cette période d’implantation que Jeannie Dove commence à s’intéresser à la Science Chrétienne. Son père est avocat et anglican, sa mère est méthodiste. Résumant son parcours professionnel, Jeannie Dove explique qu’elle a travaillé « comme couturière puis comme journaliste ».2 Selon ses propres mots, elle a « été éduquée dans une atmosphère chrétienne »,3 et elle est « une fervente étudiante de la Bible ». Lorsqu’elle entend parler de la Science Chrétienne, en 1958, son « premier réflexe est de la rejeter ».4 Mais ce sentiment évolue et elle finit par s’y intéresser activement. Elle décrit cette expérience lors d’un entretien en 1969 :
Le premier article que j’ai commencé à lire [dans un magazine de la Science Chrétienne] a attiré mon attention et j’ai… eu le sentiment que ce devait être la vérité que je cherchais. J’ai lu mon premier [Christian Science] Sentinel en entier, et avant de commencer la lecture du deuxième, je me suis levée et je me suis débarrassée de tous les médicaments qui étaient chez moi. Le jour même, un ami qui avait séjourné en Amérique est venu me voir. Dès qu’il est arrivé, sans même lui offrir un siège, je lui ai dit : « Toi qui es allé en Amérique, connais-tu ce livre d’étude dont on parle ici : Science et Santé avec la Clef des Ecritures ? « Oui ! » me dit-il. « Lorsque la vie était très difficile pour moi en Amérique, j’ai acheté un exemplaire d’occasion, et je l’ai toujours. » Je lui ai dit : Bon ! ne t’assieds pas. Tu retournes tout de suite chez toi et tu me l’apportes. J’aimerais le lire. Et apporte-moi aussi la Bible.
Jeannie Dove se souvient de sa première rencontre avec le livre d’étude de la Science Chrétienne :
Je dormais très peu. Je me levais très tôt chaque matin, et je lisais, lisais, et en trois jours je l’avais assez parcouru pour en saisir l’essentiel, vous savez, pour savoir de quoi il s’agissait… Parvenue au milieu du livre, j’ai commencé à travailler sur moi-même, à me guérir de petites choses, de sorte que, lorsque je l’ai terminé, je comprenais un peu mieux cette Science. Puis j’ai repris le livre et je l’ai relu plusieurs fois.
Jeannie Dove est devenue membre de L’Eglise Mère (La Première Eglise du Christ, Scientiste) en 1965. Puis, se souvient-elle, « après avoir étudié Science et Santé pendant plusieurs années, j’ai décidé de suivre le Cours Primaire [de Science Chrétienne]. Pour réaliser cet objectif, il me fallait travailler et prier afin d’obtenir l’argent couvrant les dépenses du voyage en Angleterre, où un professeur m’avait acceptée dans sa classe. »5 Avant cela, elle a eu une révélation nocturne qui a scellé son engagement :
… Cette nuit-là, l’idée m’est à nouveau venue de vendre tout ce qui se trouvait dans cette maison et d’utiliser l’argent pour pouvoir suivre le Cours. J’ai toujours voulu aider les gens, sur une grande échelle et de la bonne façon. Alors que je m’endormais, une belle pensée-ange m’est venue : « Parce que tu M’as Moi, tu as tout. » Je me suis endormie et, le lendemain matin, avant de me réveiller tout à fait, la pensée est revenue … parce que tu M’as Moi, tu as tout.6
Jeannie Dove se rend en Angleterre pour suivre le Cours Primaire de Science Chrétienne, une expérience fondamentale de plusieurs jours, et elle y reste pendant six mois, travaillant et fréquentant les églises de la Science Chrétienne à Londres. A son retour au Ghana, elle se lance dans la pratique publique de la guérison par la Science Chrétienne, et son nom figure dans le répertoire du Journal à partir de 1969.7 Elle est la première praticienne demeurant au Ghana inscrite dans les périodiques. Elle aurait déclaré : « Ce travail me rend très heureuse ! »8
Une amie scientiste chrétienne remarque un changement chez Jeannie Dove à son retour d’Angleterre :
Avant de suivre le Cours Primaire, elle se considérait, à juste titre, comme une personne appartenant à la classe privilégiée [son père était avocat]. Cependant, elle est à présent très accessible et, avec humilité et confiance, elle est prête à aider, par la prière, toute personne qui pourrait faire appel à elle.9
Une autre scientiste chrétienne d’Accra relate une guérison accomplie par Jeannie Dove à cette époque :
Le fils de mon blanchisseur, atteint de polyarthrite rhumatoïde depuis l’enfance, avait été traité par différents médecins sans pour autant être définitivement guéri. Les médecins ont fini par annoncer qu’ils ne pouvaient plus rien faire pour lui. Lorsque j’ai entendu parler de son cas, il ne pouvait se lever du lit qu’avec une aide et était incapable de faire plus de quelques pas à la fois.
J’ai parlé à son père de la guérison par la Science Chrétienne et, un mardi après-midi, je les ai emmenés tous les deux chez Mademoiselle Jeannie Dove pour un traitement [par la Science Chrétienne]. Le vendredi suivant, le garçon a pu parcourir près de deux kilomètres à pied de sa maison à la mienne pour faire ma lessive. Ses articulations enflées étaient redevenues normales et ses doigts déformés s’étaient redressés. Cette guérison a eu lieu il y a deux ans, et aujourd’hui il est en très bonne santé, il est joyeux et très reconnaissant à Dieu.10
Depuis des décennies, le Cours Primaire est donné par des professeurs autorisés en Afrique du Sud, ainsi qu’en Europe, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Amérique du Nord. A partir des années 1960, l’implantation et la diversité des professeurs de Science Chrétienne se sont peu à peu étendues, à mesure que la religion gagnait des disciples dans l’hémisphère Sud. En 1973, Jeannie Dove fait partie d’un Cours Normal qui compte 30 éleves et se tient à L’Eglise Mère, à Boston. Elle devient la première professeure de Science Chrétienne noire, en Afrique.11
Quelques années après avoir commencé à enseigner la Science Chrétienne, Jeannie Dove fait face à un problème inattendu. Elle loue la maison où elle vit et y aménage un bureau pour sa pratique de la guérison. Apprenant qu’elle a de plus en plus de responsabilités, son propriétaire suppose qu’elle est subventionnée par une organisation missionnaire étrangère, comme d’autres au Ghana. En réalité, les praticiens et les professeurs de Science Chrétienne ne sont pas employés par l’Eglise de la Science Chrétienne, mais sont rémunérés par leurs patients et leurs élèves. Le propriétaire augmente considérablement son loyer, au point que Jeannie Dove craint de devoir quitter la ville et trouver un emploi pour survivre. Cela représente un sérieux défi non seulement pour elle, mais aussi pour les modestes débuts de l’enseignement de la Science Chrétienne en Afrique de l’Ouest.12
Les Administrateurs testamentaires de Mary Baker Eddy parviennent à lui proposer une solution. Cet organisme fournit aux églises et aux particuliers l’assistance dont ils ont besoin. Sous ses auspices, L’Eglise Mère rachète la maison de Jeannie Dove à son propriétaire et s’arrange pour qu’elle puisse l’acheter ensuite à l’Eglise, grâce à un crédit hypothécaire mensuel équivalent à son ancien loyer. Cet arrangement est satisfaisant, et Jeannie Dove peut augmenter le montant de ses paiements au bout de quelques années.
Jeannie Dove demeure praticienne et professeure de Science Chrétienne inscrite jusqu’en 1999. Elle aura exercé son ministère pendant 30 ans. Elle a rédigé plusieurs articles pour les magazines de son église. Lors d’une émission de radio en 1987, elle revient sur les débuts des expériences qu’elle a vécues :
J’ai toujours été à la recherche de la vérité. J’étudiais la Bible. Je savais ce que j’attendais de la Bible, mais je ne l’avais pas trouvé. Plus tard, je me suis dit : quand je trouverai la vérité, je la reconnaîtrai… Lorsque j’ai ouvert [Science et Santé, page vii] et que j’ai lu cette phrase : « Pour ceux qui s’appuient sur l’infini, soutien constant, aujourd’hui est riche en bienfaits », j’ai davantage ressenti la puissance de Dieu. C’était la vérité que je cherchais.13
Ecoutez « Women of History from the Mary Baker Eddy Library Archives » [Dans les archives de la Bibliothèque : Des femmes ayant marqué l’Histoire], un épisode du podcast Seekers and Scholars [Chercheurs et universitaires] avec Steve Graham et Dorothy Rivera, membres de l’équipe de la Bibliothèque.
Cet article est aussi disponible sur nos sites en allemand, anglais, espagnol et portugais.
- First History and Report of Christian Science Society, Accra, from June 1960 to October 1963 [Premier récit historique de la société de la Science Chrétienne, à Accra, de juin 1960 à octobre 1963] (Accra: Lona Press) s.d., 1-2, Archives de l’Eglise. Son développement aboutit par la suite à la reconnaissance officielle de Première Eglise du Christ, Scientiste, Accra, en 1976.
- Notice biographique, Mademoiselle Jeannie Dove, Accra, Ghana, s.d., Archives de l’Eglise.
- Jeannie Dove, « Casting away the garment » [Jeter son manteau], Christian Science Sentinel, 6 septembre 1975, 1551.
- Jeanne Dove, « A Glimpse of Soul and Body » [Un aperçu de l’Ame et du corps], The Christian Science Journal, septembre 1976, 500-501.
- J. Dove, Testimony [Témoignage], The Christian Science Journal, Octobre 1972, 595.
- « But what can I do? » [Mais que puis-je faire ?] Archives de l’Eglise, F258172, 1970.
- Jeannie Dove avait déjà vécu en Angleterre, où elle s’était mariée, après la Seconde Guerre mondiale. Elle explique que « l’attitude cruelle » de son mari – après l’hospitalisation de ce dernier pour cause de « dépression nerveuse » – lui rendait la vie insupportable. Ils divorcent en 1957. Elle raconte : « Peu après le divorce, j’ai trouvé la Science qui m’a apporté beaucoup de joie et de bonheur. » Jeannie Dove au service Activité des églises filiales et des praticiens, 21 janvier 1969, Archives de l’Eglise.
- « But what can I do? » 1970.
- « Resume », s.d., Archives de l’Eglise.
- Clara Georgina Simpson, « Testimony of Healing » [Témoignage de guérison], s.d., Archives de l’Eglise. Dans une correspondance ultérieure, Georgina Simpson date la guérison de 1967.
- L’Afro-Américaine Georgia L. Newton a suivi le Cours Normal la même année ; des décennies plus tôt, Lulu M. Knight a été la première personne de couleur à enseigner la Science Chrétienne. D’autres ont suivi aux Etats-Unis, en Amérique latine, en Afrique et en Asie.
- « Summary of background on the purchase of Jeannie Dove’s house » [Résumé du contexte de l’achat de la maison de Jeannie Dove], Lloyd G. Marts au Conseil des directeurs de la Science Chrétienne, 6 avril 1981, Archives de l’Eglise.
- « Breaking free from feeling trapped » [Se libérer du sentiment d’être prise au piège], Sentinel Radio Edition, 28 novembre 1987, https://sentinel.christianscience.com/sentinel-audio/sentinel-radio-edition/1987/breaking-free-from-feeling-trapped